EN BREF
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Les fournisseurs de cloud accélèrent leurs engagements en matière environnementale, mais ces indicateurs écologiques semblent insuffisants pour servir de réel critère de choix aux DSI. Antoine Lagier, consultant cloud senior, souligne dans son analyse que malgré une meilleure efficacité énergétique affichée par le cloud par rapport à l’IT interne, les indicateurs tels que le PUE (Power Usage Effectiveness) ne prennent pas en compte des éléments cruciaux comme l’intensité carbone de l’énergie utilisée. De même, le CUE (Carbon Usage Effectiveness), qui évalue les émissions de carbone, est presque absent des communications des principaux acteurs du cloud, sauf pour OVH. Au lieu de cela, des pratiques de greenwashing prédominent. Le WUE (Water Usage Effectiveness) montre une consommation d’eau significativement moindre par rapport aux normes, bien que les données fournies soient souvent trop générales pour en tirer des conclusions précises. Les dirigeants informatiques nécessitent des données plus détaillées pour évaluer l’impact de leurs choix technologiques en matière de durabilité.
Alors que la pression monte pour intégrer des considérations environnementales dans les décisions d’approvisionnement technologique, les indicateurs écologiques du cloud sont devenus une source de confusion pour les dirigeants informatiques. Cet article explore la pertinence de ces indicateurs, tels que le PUE, le CUE et le WUE, tout en soulignant les défis méthodologiques qui en compliquent l’interprétation. En analysant les divers engagements des fournisseurs de cloud et leurs implications environnementales, nous mettrons en lumière les raisons pour lesquelles ces données peuvent s’avérer superflues pour les décisions stratégiques des DSI.
Une multitude d’indicateurs, mais quelles réelles valeurs ?
Les fournisseurs de cloud adoptent de plus en plus des engagements en matière de durabilité, mais il est crucial de se demander quelles implications ces engagements ont réellement pour les entreprises. Les indicateurs écologiques comme le PUE (Power Usage Effectiveness), le CUE (Carbon Usage Effectiveness) et le WUE (Water Usage Effectiveness) sont souvent mis en avant dans la communication des fournisseurs, mais leur utilité reste contestable pour les DSI. Ces mesures semblent parfois détachées de la réalité opérationnelle des entreprises et peuvent prêter à confusion en raison de leur manque de transparence méthodologique.
Le PUE : un indicateur d’efficacité ?
Le PUE est un indicateur d’efficacité énergétique des datacenters qui mesure le rapport entre l’énergie totale consommée par le datacenter et l’énergie utilisée par les équipements informatiques. En théorie, plus ce ratio est proche de 1, plus le datacenter est efficace. Les grands fournisseurs de cloud comme Meta, GCP et AWS présentent des PUE compétitifs, souvent inférieurs à ceux des datacenters traditionnels.
Cependant, le PUE ne raconte qu’une partie de l’histoire. Il ne prend pas en compte des facteurs essentiels tels que l’intensité carbone de l’énergie utilisée ou le taux de charge des équipements. Cela signifie que, même si un datacenter affiche un PUE impressionnant, il pourrait encore dépendre de sources d’énergie peu durables, ce qui limite son attrait pour les DSI soucieux de l’impact carbone de leurs opérations.
L’importance de la source d’énergie
Le défi lié au PUE réside en grande partie dans le fait qu’il ne mesure que l’efficience énergétique sans examiner la source d’électricité. Les DSI cherchent à réduire leur empreinte carbone, mais le PUE ne désigne rien sur le type d’énergie consommée. Par exemple, un datacenter utilisant principalement des énergies fossiles peut afficher un PUE impressionnant, mais sa contribution à l’émission de CO2 reste significative.
Le CUE : une absence remarquée
Le CUE devrait théoriquement fournir une vue d’ensemble sur les émissions de carbone par kWh d’énergie consommée. Malheureusement, cet indicateur est largement absent des communications des fournisseurs de cloud, avec quelques exceptions comme OVH. Cela soulève des questions cruciales sur le sérieux des engagements environnementaux de ces entreprises.
Les DSI, en quête de données précises pour évaluer l’impact environnemental de leurs choix technologiques, se retrouvent face à un vide d’information. Alors que les médias et les rapports mettent en avant la nécessité de réduire les émissions, le manque de transparence concernant le CUE rend difficile une évaluation équitable des services proposés par différents acteurs du cloud.
Les opérations de greenwashing
Dans ce contexte, le sujet du greenwashing devient pressionné. Les fournisseurs de cloud investissent dans des opérations de communication sur des notions comme la « neutralité carbone » ou « 100 % d’énergie renouvelable », des étiquettes souvent sophistiquées qui peuvent dissimuler une réalité moins engageante. La comptabilité carbone autorise divers modes de calcul, ce qui rend difficile la comparaison des engagements entre différentes entreprises.
Le WUE : une mesure d’utilisation de l’eau
Le WUE règne sur une autre dimension de la durabilité des datacenters : l’utilisation de l’eau. Cet indicateur mesure la quantité d’eau utilisée par kWh d’énergie consommée. Alors que les ressources en eau sont de plus en plus surveillées, certains fournisseurs de cloud se sont engagés à restituer l’eau utilisée pour leurs opérations, une initiative souvent saluée par le marché.
Pourtant, comme avec les autres indicateurs, les chiffres présentés peuvent varier grandement et ne reflètent pas nécessairement les pratiques opérationnelles réelles. Les DSI ont besoin d’une vision nuancée des implications de ces chiffres pour que leur évaluation des impacts environnementaux soit fondée sur des données fiables.
Des chiffres moyens déconnectés
Les fournisseurs de cloud sont connus pour publier des moyennes basées sur l’ensemble de leurs datacenters au lieu de donner des informations spécifiques sur des cas individuels. Cela crée une distorsion dans la compréhension de l’impact réel de leurs activités. Les DSI ont besoin de chiffres plus granulaires pour prendre des décisions éclairées concernant leurs choix technologiques.
Des considérations stratégiques pour les DSI
Face à cette situation, les DSI doivent élaborer des stratégies plus robustes pour évaluer les offres de cloud. En raison du flou méthodologique qui entoure les indicateurs écologiques, il est essentiel d’examiner d’autres critères pour guider les décisions. Des évaluations holistiques tenant compte non seulement des engagements environnementaux, mais aussi des implications pratiques pour les opérations de l’entreprise, devraient être mises en avant.
Les références à la législation et à la régulation
Il est primordial que les DSI se tiennent informés des législations émergentes sur la durabilité et l’impact environnemental des technologies, notamment en termes d’indicateurs de performance liés au numérique. Selon les réglementations, l’obligation de transparence sur les émissions de carbone pourrait redéfinir la manière dont les entreprises proposent leurs services de cloud.
Conclusion : Naviguer dans un écosystème complexe
En naviguant dans l’écosystème complexe des cloud providers, les DSI doivent faire preuve de prudence et de discernement en matière d’évaluation des données écologiques fournies. Alors que les exigences en matière de durabilité augmentent, il devient crucial de développer une compréhension approfondie des indicateurs disponibles et de leurs implications pratiques. L’analyse des engagements des fournisseurs, couplée à une évaluation rigoureuse des choix stratégiques, est la clé d’une transition vers un modèle de cloud plus durable.

Témoignages sur les indicateurs écologiques du cloud : des données superflues pour les dirigeants informatiques ?
« En tant que DSI, je me trouve souvent submergé par les engagements environnementaux annoncés par les fournisseurs de cloud. Pourtant, il est difficile de s’y fier sans indicateurs concrets. Les chiffres sur l’efficacité énergétique et les émissions de carbone sont souvent vagues, rendant toute prise de décision ardue. »
« J’ai constaté que le PUE est souvent cité comme un indicateur clé, mais il ne reflète qu’une partie de la réalité. Un bon PUE ne garantit pas une faible empreinte carbone. Nous avons besoin de données plus précises sur les émissions réelles pour pouvoir faire un choix éclairé. »
« Dans ma recherche d’un fournisseur, je me suis heurté à la difficulté de comparer les offres de cloud. Les promesses de neutralité carbone et d’énergie renouvelable sont omniprésentes, mais sans transparence sur les méthodes de calcul, je reste sceptique quant à leur sérieux. »
« L’absence de l’indicateur CUE dans les communications des fournisseurs me préoccupe. Cet indicateur aurait été essentiel pour évaluer les émissions de CO2 par kWh. Au lieu de cela, nous sommes bombardés de termes vagues, ce qui rend notre travail encore plus complexe. »
« Les engagements des acteurs du cloud concernant la gestion de l’eau et leur efficacité sont louables, mais je m’interroge sur la manière dont ces chiffres sont établis. En tant que DSI, j’ai besoin de données granulaire qui reflètent mes déploiements réels, pas de moyennes qui peuvent égarer. »
« Je suis d’avis que les utilisateurs finaux ne devraient pas avoir à décoder des termes complexes et des indicateurs ambigus. Les fournisseurs doivent s’efforcer de rendre leurs données davantage accessibles et compréhensibles pour nous, dirigeants informatiques. »